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Des facilités


Rien d'extraordinaire. Juste une mémoire à toute épreuve. Qui retient, non pas tout, mais toujours.

Rien d'extraordinaire. Juste une logique et un raisonnement qui décomposent, allégorisent, utilisent tous les objets brillants à sa portée, sans peine.

Rien d'extraordinaire. Juste une sensibilité douloureuse. Cette sensibilité qui m'éloigne de tous ceux qui n'éprouvent pas le besoin de vibrer dans le visible et l'invisible. Une susceptibilité débordante. Une agressivité refoulée, parce qu'il ne faut pas que j'insiste. non. surtout pas. 

Rien d'extraordinaire. Juste un besoin intense de comprendre et d'essayer, non pas avec ma tête mais avec ma moelle. Savoir et entendre, étendre son corps au delà de ses frontières, toucher les choses avec mon âme.

Rien d'extraordinaire. Juste la capacité inexpliquée de comprendre et savoir tout ce qu'il m'est dit. Apprendre à piler le gingembre sur une pierre parce que j'ai entendu une femme parler de ses souvenirs d'enfance. Savoir grimper une paroi parce que l'Explorateur me parle du froid du rocher et du vide sous ses pieds. Comprendre en entendant ce qui n'est même pas dit.

Rien d'extraordinaire.

Juste des facilités.

Mais ça ne veut rien dire. Tu sais, il existe une multitude d'intelligences. Certains sont bons en maths, d'autres en français, d'autres en danse, d'autres à la peinture, d'autres en mécanique, d'autres en poterie, d'autres pour prendre soin des hommes. Nous sommes tous différents, mais égaux. Ceux qui n'ont pas l'intelligence de ça, ont l'intelligence d'autre chose.

L'Explorateur a bien voulu me faire une photo pour l'article ! On voit tout de suite la différence !

Cet équilibre dans lequel je croquais à pleine dent, tout ce que je réussissais, ne faisait que gaspiller le cotas d'intelligence qui m'était donné. Tout ce que je réussissais… Un jour peut-être rencontrerai-je ce que je ne peux pas faire, ce que je ne peux pas apprendre, parce que j'avais déjà trop su. Avant. Parce que j'avais trop appris. Un cerveau trop petit. Un cerveau à égalité avec ceux que je voyais, petit à petit, rencontrer leur limite. Et cet échec qui ne venait pas. Jamais. Ce fossé que je creusais quelque part, toujours plus profond. Qui m'effrayait parce que je le savais immense. J'avais peur dans ma tête.

Alors jamais, non jamais être trop maligne. Trop intelligente. Il ne faut pas que je mange trop de ce potentiel partagé à égalité.

Et puis repousser toujours plus, au plus loin, mes faiblesses. Et si le fossé était tout simplement derrière elles ? Refuser de dire des bêtises. Refuser de m'exprimer tout court, parfois. Même devant ce test de logique, je n'ai pas voulu être trop intelligente.

Et finalement, me rendre compte que j'avais un potentiel plus important que ce qu'on m'avait dit.

Rien d'extraordinaire, oh non. Juste, des facilités.

Et savoir que ce fossé que je pensais quelque part creuser n'existe tout simplement pas. Je n'ai pas encore tout exploré, tout ce dont j'étais capable d'explorer et je peux encore continuer. Tranquillement. Mes bêtises ne sont pas là pour le cacher à ma vue. Elles sont là parce que j'ai droit, moi aussi, de me tromper parfois.

Quel soulagement !

Et les limites que je rencontre chez les uns et les autres ne sont que cognitives. Elles ne sont pas le mauvais présage des miennes. Je n'ai pas à les repousser, à les combler, elles ne sont ni effrayantes ni funestes. Elles ne sont pas le reflet de mes propres capacités.

Oh non, je n'ai pas eu une immense révélation cette semaine. J'ai simplement adouci le regard que j'avais sur les capacités de chacun, sur moi-même. Ma question était faite d'épinards. Dès que j'ai commencé à la cuisiner, elle a réduit en volume, jusqu'à ne plus être qu'une surface brillante, fine et douce.

Que vais-je dire à ma fille, maintenant que je sais ? Maintenant que je vois très clairement de quelle façon elle va suivre, elle aussi, sa route, avec ses propres capacités. Nous sommes tous égaux, nous sommes tous égaux devant notre droit d'existence et de reconnaissance mais je n'avais pas le droit de renier nos inégalités biologiques. Je reniais un peu de ma propre réalité, d'un peu de la réalité de tout le monde.

Je ne sais pas vraiment si je vais mieux vivre maintenant que je sais et que j'ai compris. C'est bien trop récent pour que je sache précisément ce que je vais faire de tout ça. Je vais peut-être parler avec mes parents. Peut-être réparer avec eux, s'ils le veulent, quelques égratignures. Je vais peut-être oser vivre un peu plus, laisser mieux vivre les autres, être moins exigeante, plus compréhensive. Ne plus me dire : "Ce qu'il dit est inutile." et plutôt : "Pourquoi cela lui parait-il important ?". Lâcher prise, ne plus craindre de me tromper, ni d'avoir peur que mes capacités soient un jour remises en question. Peut-être vais-je devenir moins susceptible…

Mais une chose est certaine : ce que je suis aujourd'hui, je l'ai toujours été. C'est inscrit dans mon corps, dans ma tête. C'est inscrit, et ça ne risque pas d'être avalé par le gouffre d'une prétendue égalité. Je vais avoir moins peur de moi-même.

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A bientôt !
Céline.

J'ai pas assez joué à la marchande…


En temps qu'écrivain, je me plaisais bien. J'étais assise dans un bon fauteuil, l'hiver à ma fenêtre, une loupiote au dessus de mon épaule. L'ostéopathe m'a bien dit que pour le dos ce n'était pas optimal mais pour la concentration et l'inspiration c'était extraordinaire. Je pense que je ne pourrais pas réécrire dans de si bonnes conditions avant longtemps. Enfin, bref, pour cette partie, tout marchait comme sur des roulettes.

Et puis j'ai fait mes petits devis auprès des imprimeurs, j'ai bien travaillé la mise en page et tout… Le résultat est super ! La marge que j'ai choisie est formidable, très équilibrée, le livre n'est ni trop lourd ni trop léger à prendre en main, la police est claire comme de l'eau de roche, le livre ressemble comme deux gouttes d'eau à un… livre. C'est du beau travail et je suis contente.

Et puis arrive le moment de le vendre. Et là : je suis nulle. Ma maman et mon adorable belle-maman en vendent à la pelle. Même mon papa a réussi à s'y mettre ! Et moi… Et bien heureusement que j'ai des amis et des bloggeurs sympas autour de moi parce que ça ne va pas fort. Je n'arrive pas à le vendre. Ma maman me dit qu'elle emporte un livre toujours avec elle, pour le proposer à tous ceux qu'elle rencontre. Et ça marche super bien ! De mon côté, je ne dois pas voir assez de monde parce que bon, c'est pas le top.

C'est de ma faute aussi, pourquoi n'ai-je pas déjà fait le tour de mon village, un livre sous le bras ? Pourquoi n'ai-je pas déjà déposé une affiche à la boulangerie ? Pourquoi n'ai-je pas déjà contacté les librairies et les grandes surfaces du coin ?

C'est bien présenté, n'est-ce pas ?

J'ai le sentiment que c'est toujours plus facile pour les autres. Un écrivain qui veut vendre son livre, ça fait pas super classe. J'ai toujours l'impression que je dois m'excuser. "Wahoo ! C'est toi qui l'as écrit ?" Oui… "Bah félicitations !" Je dis merci, et puis je me sens obligée de rajouter que ce n'est pas grand chose. "Tu l'as écrit en combien de temps ?" Euh, en trois mois…

C'est pas ma faute si j'écris vite, mince ! Ca veut pas dire que c'est un mauvais livre. Il est très bon ce livre ! Comment dire : "C'est un super livre." (ou toute phrase dérivée) sans me vanter moi-même ?

"Je l'ai écrit avec le coeur." Ouh… la grosse sensible, on va voir sa vie déroulée de A à Z ça va être ennuyeux à mourir. PAS DU TOUT !

"C'est ma passion depuis toujours, j'ai toujours voulu être écrivain…" Bon, vu le nombre de rides qu'elle a sur la tronche, on va avoir droit à un écrit de niveau lycée, à peine, ça craint… MAIS C'EST PAS VRAI !!

"L'histoire est vraiment prenante." Un livre à multiples rebondissements, sans queue ni tête, la belle affaire je vais pas pouvoir le finir. MAIS TU N'AS MEME PAS LU LA 4ème DE COUVERTURE !!!

Vous voyez le genre ?

Quand on vend son propre livre, on se vend un peu soi-même. Alors il y a les amis et ceux qui vous lisent déjà, qui sont soit complètement convaincus, soit pas du tout intéressés et pour eux c'est facile. Et puis il y a les autres gens, ceux qui savaient même pas que vous étiez écrivains. Et là, ça change complètement le regard qu'ils ont de vous-même lorsque vous leur présentez votre livre. Il vous regarde avec des yeux neufs. L'admiration, le doute, l'intérêt, l'envie soi-même d'écrire un livre aussi, les questionnements (écrivain ? mais comment elle gagne sa vie ?)… comment faire de tout ça une vente ?

Je voudrais ne pas avoir à me justifier. Je présente mon livre. Vous aimez lire ? Le sujet vous intéresse ? Oui, bah achète-le et on n'en parle plus. Je ne voudrais pas que toutes mes rencontres deviennent commerciales, c'est normal, non ?

Bon, tout ça pour vous dire que depuis septembre je n'ai vendu que 40 livres et que ma maman et ma belle-maman, à elles deux, en ont déjà fait partir près de quatre fois plus… Et Noël arrive et j'ai une pression de fou ! Je compte bien prendre le taureau par les cornes, qu'il faut que je m'améliore, que j'arrête de me plaindre inutilement, que je me bouge les fesses quoi, que j'aille de l'avant, que je gagne un peu ma vie, que je vende ce livre.

Si vous avez des conseils, n'hésitez pas. Moi, je vais tout tenter.

C'est un super livre, que diable ! Ca va marcher !

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Céline.

La volonté et la liberté

Qu'est-ce que la liberté ? Comment l'apprendre aux générations futures lorsque cette notion est encore pour nous tellement riche d'idées de sacrifices et de militantismes ? La liberté s'arrête-t-elle vraiment là où commence celle des autres ? Comment ne pas confondre liberté et respect ? Loin de moi l'idée de rédiger ici un cours de philosophie, je me pose aujourd'hui bien trop de questions pour chercher à vous expliquer quoique ce soit, mais liberté en ce moment s'associe tellement avec des mots incongrus que je suis un peu perplexe. Ai-je bien compris ce qu'était la liberté ? Suis-je tellement à côté de la plaque ?

J'ai une vision très montessorienne et spirituelle de la liberté. D'après moi, être libre c'est avant tout vivre comme mon essence le réclame. Lorsque je suis libre, j'ai le sentiment de me rapprocher au plus près d'une humanité profonde. Et par un magnifique raisonnement non trivial, je dirais que ma liberté n'a ni commencement ni fin. Parce que ma liberté émane de moi comme elle émane de ce que le monde extérieur me renvoie, ma liberté n'est pas une aura dense qui m'entoure, elle est la continuité fluide et vaporeuse de la vôtre. Si votre liberté se volatilise, la mienne ne prendra pas jamais son essor sur ce territoire découvert. La mienne pourra suivre votre dissolution, c'est si facile, nos libertés sont tellement proches les unes des autres…



Etre libre, est-ce choisir ? Etre libre, est-ce plutôt lutter ? Etre libre, est-ce savoir ? Etre libre, est-ce penser ? Comment être libre lorsqu'on ne sait même pas qui l'on est ?

Cette liberté spirituelle ne s'exprime pas en faisant ce que l'on veut, mais en voulant ce que l'on fait. Pour être libre, je développe ma volonté. C'est une volonté personnelle, non dictée par la violence, par une opinion, par une idée théorique de ce que devrait être l'humanité. Acte et essence mutualisent leurs désirs d'existences. L'être humain ne peut plus être un outil, l'être humain nait doucement en son coeur.

Alors, oui, peut-être que pour être libre il faut savoir, être instruit, pour que les idées et les mots ne floutent plus notre envie d'être. Oui, être libre c'est sûrement penser aussi, car penser est un acte tellement proche de nous-même qu'il serait dommage de s'en priver. Oui, être libre c'est peut-être aussi lutter, ou choisir, la vie n'est pas toujours simple, il faut bien l'avouer.

Pour apprendre la liberté à ma fille je n'ai pas d'autres choix que de la placer devant le monde dans toute son existence. Je n'ai pas d'autres choix que de préserver sa nature en refusant dans mon foyer les violences. Je n'ai pas d'autres choix que de respecter profondément sa volonté, car sa liberté s'exprime à travers elle. Je n'ai pas d'autres choix que de l'aimer profondément, car mon amour développe l'amour qu'elle a pour elle-même et pour son univers. Je n'ai pas d'autres choix que de retenir tout jugement, toute leçon, qui sortirait de ma bouche car je sais qu'avant de chercher à toucher et décorer la liberté des autres, il est bon d'entretenir d'abord la sienne propre.

Et je vois déjà dans ses gestes et dans son coeur se dessiner une liberté véritable. Il y a déjà dans ses gestes et dans ses paroles des choses magnifiques qu'elle n'a appris de nul part, si ce n'est qu'auprès de sa nature profonde. Et sa liberté nourrit la mienne, comme la votre enrichit encore et toujours mon âme.

Je suis assez perplexe en voyant ce qu'on fait de cette liberté. J'en partage l'idée de beauté et de puissance, mais je ne crois certainement pas qu'on puisse en faire autre chose que ce qu'elle est. Une arme de guerre ? Mais y a-t-il des vainqueurs face à la liberté ? Ou même une idée de réussite ? La liberté n'est pas une fin, mais seulement le commencement de la vie humaine.

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Céline.

Comment devenir écrivain


Cet article s'adresse aux personnes qui rêvent de devenir écrivain mais qui ne savent pas comment on accède à ce métier. Ecrivain, c'est particulier, voyez-vous, comme pour tous les métiers artistiques. On peut bien faire une école d'arts plastiques, de musiques, de lettres ou je-ne-sais-quoi, ça ne fera pas de vous un peintre, un sculpteur ou même… un écrivain. Pour être écrivain, il faut faire. Il faut concrétiser votre savoir faire, vos mots. Et c'est souvent là que le bât blesse. C'est vrai qu'il y a beaucoup de romans imprimés tous les ans, c'est vrai qu'il n'est pas facile de faire sa place au sein du monde littéraire. Mais là n'est pas la question. En tant qu'écrivain, vous devrez avant-tout écrire pour réaliser votre talent. La vente, le marketing, la réussite, le profil, l'argent et tout, c'est un autre métier. Enfin, ce sont d'autres métiers. Dans cet article, je vais simplement vous expliquer comment devenir écrivain. Libre à vous ensuite de devenir l'écrivain que vous voulez : à succès, maudit, raté, à l'académie française, amateur. Allez, entrons dans le vif du sujet !

Bon, là, vous allez me dire : "Ok, je passe. C'est un article bidon." Stop ! C'est pas un article bidon, c'est un conseil é-vi-dent. Et oui, pour exercer une activité, qu'elle soit professionnelle, sportive, de loisir ou quoique ce soit, il faut lui consacrer du temps. C'est une évidence. Mais permettez-moi quand même de vous le rappeler. Etre écrivain, ça prend du temps… Un temps fou !
On pourrait dire un truc du genre : imaginez un dentiste qui vous dit qu'il est dentiste mais dont le cabinet est tous les jours fermés, est-il vraiment un dentiste ?
Déjà, si je vous disais ça, ça serait une bonne chose de faite. Mais ce n'est pas suffisant. Un écrivain travaille beaucoup plus qu'un dentiste, qu'un médecin ou qu'un ingénieur. Un écrivain n'a pas d'horaires. Un stylo ou un clavier peut fonctionner 24h/24 tant qu'il y a de la lumière au dessus de lui, alors l'écrivain peut travailler tout autant (et mon clavier est lumineux, imaginez donc mes horaires !).
Donc, avant de commencer le moindre projet : reposez-vous, trouvez une nounou pour les enfants, passez à 25% dans votre autre travail, mettez de l'argent de côté, résiliez tous vos abonnements (netflix, …), finissez tous vos livres. En gros : gagnez du temps et de l'énergie coûte que coûte.

Au début, ça ne sera pas facile, croyez-moi. Vous écrirez une page le premier jour, vous serez vraiment très content de vous et puis… le second les mots ne viendront pas. Le troisième jour vous vous botterez le derrière et vous ferez une page de plus. Le quatrième votre esprit divaguera beaucoup, vous lirez des pages wikipedia à rallonge et vous vous coucherez fatigué après avoir écrit quelques lignes. Le cinquième jour vous vous demanderez si ça vaut vraiment la peine. Et puis voilà comment foutre une carrière en l'air.
L'idée est ici de rendre l'écriture comme quelque chose d'évident. Ecrire doit devenir une habitude, doit devenir naturel, facile. Et je vous assure que ça vient très vite ! Le cerveau est un organe vraiment incroyable. Si vous faites régulièrement une activité, si vous vous entraînez, vous allez rapidement progresser. Donc, écrivez vraiment très régulièrement. Tous les jours. Week-end inclus. Fixez-vous un objectif (1500 mots, 6000 caractères ?) facilement atteignable. Moi, personnellement, j'aime bien les objectifs en caractères parce dès qu'on commence à écrire, les chiffres montent viiiite ! Enfin, ça me motive bien.
Et je vous assure vous allez voir rapidement le résultat de vos efforts. Au début de mon roman, je peinais à atteindre mes 5000 caractères par jour. Parfois même je m'arrêtais à 3500 parce qu'il y avait ma fille à aller chercher ou parce que j'avais des cours. Et puis au bout d'un mois et demi, j'écrivais facilement 10000 voire 15000 caractères sans effort !
C'est un peu l'objectif du Nanowrimo je pense. Sauf que le Nanowrimo, 50000 mots en 30 jours, c'est vraiment hard (mais pas impossible !). Si vous vous lancez là dedans, quittez tout : travail, enfant, mari ! Ou alors, entraînez-vous avant. (Mais oui, vous allez y arriver !!! :-D )

Vous avez vu un peu la maîtrise ? Inversion sujet-verbe, woohoo !

Je vous présente ici un conseil que je n'ai lu nul part. Il s'agit donc d'un conseil inédit qui m'est entièrement personnel. Je ne suis pas certaine qu'il soit excellent mais c'est celui qui a fait la différence sur moi. Attachez-vous à ce que vous réalisez. Et pour s'attachez, il faut le côtoyer, le rencontrer, le dorloter, pendant plusieurs jours. Oui, écrire régulièrement pour un blog, des petites nouvelles, des poèmes, c'est une bonne chose, ça entraîne, mais ça n'a rien à voir avec une oeuvre construite. La longueur de votre réalisation a une importance capitale dans l'expérience que vous allez acquérir en tant qu'écrivain.
Comme lorsqu'il s'agissait d'écrire des dissertations de français, un travail effectué en 30 min n'a rien à voir avec un écrit de 2h, ou de plusieurs jours…
Etre écrivain signifie que vous écrivez pour plusieurs jours… Vous allez faire un travail sur plusieurs mois ! Alors, n'hésitez pas à vous lancez dans un projet d'envergure. Un recueil complet, un ROMAN !
Petit à petit, jours après jours, comme pour l'expérience que vous allez acquérir en écrivant régulièrement, vous allez développer une réelle affinité avec votre oeuvre. Vous connaîtrez vos personnages sur le bout des doigts, vous y penserez tout le temps, vous rêverez comme vos personnages. Ils prendront vie autour de vous. Et l'écriture n'en deviendra que plus évidente !

N'hésitez pas à faire lire ce que vous écrivez. La lecture par autrui est à la fois un piège est un excellent stimulant. C'est un piège si une fois que quelque chose est lu, vous vous interdisez de le modifier. Par exemple : "Oh ! Untel a lu que mon personnage s'appelait comme ci ou comme ça, que lui c'était l'oncle, qu'en fait il était orphelin… Voilà maintenant je dois faire avec !" Non, non, non ! La lecture ne rend pas votre oeuvre intouchable, vous êtes libre de la modifier encore et encore tant… bah tant qu'elle n'est pas imprimée, pardis !
C'est pareil avec les éléments dont vous n'êtes pas certain. Si vous êtes lancé, attendez plutôt un temps mort pour vérifier. (Quelle est la monnaie en Mongolie ? Aucune importance, là n'est pas le sujet, on verra plus tard ! Allez, j'écris !)
Faire lire me motivait beaucoup. Je me disais que l'Explorateur devait lire, au moins, un chapitre par semaine. Oui, je ne lui faisais lire ce que j'avais fait que chapitre après chapitre, il ne lisait rien de pas-fini-du-tout, ça me mettait trop de pression sinon. Et il aimait ce que j'écrivais ! Il aimait beaucoup ! Il me disait : "La suite ! La suite ! C'est trop prenant !" Alors j'avais envie de m'y remettre dans l'instant.
Voir que ce qu'on écrit plait, est vraiment très motivant. Et puis, je pouvais parler de mes personnages avec quelqu'un. Il me racontait ce qu'il pensait de tel ou tel personne et ses réflexions m'aidaient beaucoup pour rendre mes personnages encore plus vivants !
Et ne vous cherchez pas mille et une excuses si ce que vous avez écrit n'est pas satisfaisant : évidemment que ce n'est que le premier jet, évidemment qu'il y a encore des fautes, évidemment que vous pouvez corriger les répétitions, les phrases trop longues et tout. Tout ça n'a pas vraiment d'importance tant que vous arrivez à toucher du bout des mots l'essence de votre oeuvre. Un bon lecteur, un lecteur qui vous encourage, ne vous en tiendra pas rigueur. Ayez confiance en lui.

Là, c'est encore une évidence… Vous voulez être un écrivain à succès ? Ecrivez quelque chose de bon, qui plait, qui se publie bien. Vous voulez être un écrivain jeunesse ? Ecrivez quelque chose pour les enfants de l'âge qui vous intéresse. Enfin, voilà quoi, je ne vais pas détailler. Et rencontrez d'autres écrivains dans votre genre. N'hésitez pas à les contacter ! Ne restez pas planqué. Ne restez pas un écrivain qui rêve de le devenir parmi d'autres écrivains en herbe.

C'est peut-être quelque chose qui se discute. Sommes-nous notre métier. Sommes-nous encore notre métier lorsqu'on sort du bureau, du cabinet, de l'usine… Un professeur est-il encore un professeur lorsqu'il fait ses courses ? Un dentiste (oui, encore lui) est-il encore un dentiste lorsqu'il mange une barbe à papa dans une fête foraine ? Un cuisinier est-il encore un cuisinier lorsqu'il mixe la soupe pour ses enfants le soir ?
Bon, vous êtes écrivain du moment où vous vous lancez pleinement dans votre projet, alors n'hésitez pas à le dire autour de vous ! Oui, vous laissez les enfants chez la nounou alors que vous restez à la maison, mais c'est normal : vous êtes écrivain ! Oui, parlez-en, n'hésitez pas. Et si on vous pose une question gênante du genre : "Ah oui… et vous avez écrit combien de livres jusque là ?" N'hésitez pas à mentir selon la personne qui vous interroge. Vous n'avez pas à justifier votre profession devant tout le monde. Personne ne demande à voir le diplôme d'un… dentiste lors d'une discussion à la table d'un restaurant que je sache ! Dites ce que vous voulez : "J'écris mon premier roman, un éditeur s'est déjà montré intéressé par mon oeuvre." Ou, si vous êtes sûr de ne pas revoir votre interlocuteur trop régulièrement : "Vous pouvez trouver mes ouvrages à la FNAC." Ah ah ! Qu'est-ce qu'on s'amuse !
Devenir professionnel ne s'arrête pas là. Vous vous présentez aux autres comme un écrivain alors… soyez écrivain, pensez écrivain. Promenez-vous avec un calepin si ça vous aide, renseignez-vous continuellement sur tout, pour nourrir vos futurs romans. Soyez curieux, créatifs ! Pas besoin de porter des lunettes mais ça doit devenir une évidence à vos yeux : vous ETES un écrivain.

Faire éditer un livre peut prendre beaucoup-beaucoup de temps alors en attendant l'édition à 100 000 exemplaires, pourquoi ne pas faire imprimer votre ouvrage à petit tirage ? 10 ou 20 pour la famille, en impression à la demande pour vos fans ? Faites une belle mise en page, choisissez un beau papier. Faites vous plaisir et soyez fier de vous ! Déposez-le auprès de la BNF (ou ailleurs), pour le protéger.

Alors là, c'est un conseil que je donne à moi-même. J'ai écris mon premier roman l'hiver dernier et depuis je ne me suis pas lancée dans un gros projet d'écriture. Je m'entretiens un peu avec le blog, c'est vrai, mais je vous assure que ça n'a rien à voir avec un roman. Alors la belle expérience que j'avais acquise l'année dernière, mes 10 000 caractères par jour et tout et tout, je l'ai perdue, j'en ai bien peur. 
Etre écrivain ça s'entretient. Et ce n'est pas facile de faire de la place aux dédicaces, aux ventes du premier livre, à sa promotion, distribution, aux autres travaux qui reprennent leur place dans l'emploi du temps, aux enfants qu'il ne faut pas négliger quand même… enfin à tout ça et aussi au second roman (encore meilleur que le premier !) qui attend son tour.

Vraiment, être écrivain, ce n'est pas de la tarte !

Allez ! Soutenez-moi ! Commandez mon ouvrage ! Faites-vous plaisir et faites vivre un écrivain de talent ;-)

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Céline.

Le premier rendez-vous chez un psychologue

C. regarde la fenêtre, derrière le bureau. Le soleil frappe délicatement le rebord gauche, les rideaux de cotons frôlent à intervalle régulier cette marque de lumière. Les volets sont bleus éclatants, cette lumière, ce blanc vaporeux, ce bleu pétillant, ce jaune clair comme l'hiver, la réconfortent.
Alors, dites moi pourquoi venez-vous ici.”

Les couleurs pouvaient peut-être ressembler à ça…


Elle avait vu comment cette dame disait bonjour. La psychologue ne s'avançait pas vers ses patients, elle les laissait venir. Alors C. avait joué le jeu. Elle s'était approchée comme convenu, le sourire au lèvre, et lui avait serré la main avec assurance. Le jeu, elle ne veut plus le faire. Elle veut découvrir la vérité, enfin. Elle ne veut pas être quelqu'un, elle veut être elle-même. C'est d'ailleurs ce qui l'amène ici.
“Je ne sais pas comment vous dire. Vous voulez une version longue ?”
“Dites moi clairement.”

Sans prévenir, la gorge de C. se serre. Elle va pleurer, elle qui était venue ici de plein grès, qui s'était levée ce matin de bonne humeur, sûre de son choix… Elle va pleurer. Elle dit les mots, rapidement, clairement. Et les larmes coulent.
“Pardon. Je m'étais dit que je ne pleurrais pas. C'est ridicule, je ne suis même pas triste.”
La psychologue lui tend un paquet de mouchoirs. C. n'aime pas ça. Elle ne voulait pas pleurer et ces mouchoirs lui en donne le droit. Ces mouchoirs banalisent ses larmes. Ces mouchoirs lui disent : "vos larmes sont naturelles."

C. ne veut pas en rester là. Elle veut comprendre. Elle détaille.
“C'est récent vous savez. C'est une question que je me suis toujours posée. Mais jamais avec la même forme. Elle a évolué avec moi. Petite, je pensais avoir des pouvoirs magiques…”
C. continue, les larmes se taisent. Sa voix ne tremble pas, elle n'a jamais tremblé. Alors pourquoi ces larmes ? Elles n'ont pas de sens, c'est encore une de ses inventions. Encore un rôle. Encore un mensonge. Et ses mouchoirs qui ne révèlent pas la supercherie. C. se sent coincée.

La psychologue pose ses questions doucement. Elle prend son temps. Elle les choisit. Comme ses rideaux qui oscillent toujours imperceptiblement. Ils ont été bougé il y a peu. Comme ses livres posés sur le bureau à côté de la patiente, ils ont été sélectionnés. Mais en même temps, tout cela se veut rassurant. Il n'y a pas de mots de trop. Il n'y a pas de phrases sans volonté.
C. répond à ses questions. Elle ne veut pas réfléchir pour répondre. Elle dit ce qu'elle sait. Elle a réponse à tout. Comme un voleur qui a prévu ses alibis. "Dites moi ce que je veux entendre." semblent dire ses réponses. Mais elles veulent leurs intentions discrètes. C. a peur que ça se voit. Elle voudrait que ça se voit. L'entrevue continue.

“Êtes-vous dépressive.”
“Oh ! Pas du tout !” C. sourit. La psychologue rit à son tour. Un lien se crée.
“Pourquoi doutez-vous ?”
“Parce que tout le monde se reconnaît dans les profils.”
“Oui, c'est vrai. Même moi pendant mes études quand j'étudiais les profils je me disais : "Oh, je suis ça, et puis j'ai de ça aussi." ”
“Tout le monde voudrait être quelque chose. Je voudrais éviter ça, je voudrais être moi.”

Les questions ont fait de la place à d'autres interrogations. Les réponses viennent toujours aussi facilement.
“Vous êtes hypersensible.”
Pour une fois, C. ne sait pas quoi dire.
“Qu'entendez-vous par là ?”
“Et bien vous êtes très intuitive, n'est-ce pas ? D'après ce que vous me dites…”
La psychologue semble soudain hésiter. C. a peur de trop la troubler. Elle dit une bêtise pour alléger la situation :
“Vous me voyez pleurer ici, mais dehors ce n'est pas le cas. Je pleure rarement.”
La psychologue reprend pied.
“L'hypersensibilité c'est différent. Vous êtes une personne qui a beaucoup d'intuition.”
C'est curieux comment C. refuse d'entendre cette phrase.
“Oh vous savez, je n'ai pas réponse à tout. Il y a des choses que je ne sais pas. Il y a des choses que je ne comprends pas. Je n'ai pas une intuition omnisciente.”
“Mais, est-ce que vos avis changent une fois qu'on vous a présenté les choses d'une autre façon ?”
“Non. Je ne me trompe… (rarement ?)… jamais.”
Elles passent à autre chose. La psychologue l'interroge sur ses amitiés.

Et puis finalement l'entrevue se ferme. C. sort son chéquier. La somme la surprend. Ce n'est pas exorbitant.
“Votre problème n'est pas seulement intellectuel. Il y a autre chose.”
C. signe son chèque et le tend à la psychologue. Le rendez-vous prochain est fixé. Pour un sondage. Le mot la fait rire. La psychologue s'est senti obligée de préciser ce qu'elle voulait dire. L'idée du sondage rassure C. mais ne la satisfait pas vraiment. La psychologue commence à se lever.
“Quand vous dites qu'il y a autre chose, est-ce quelque chose dont je n'ai pas conscience ?”
La question trouble un instant la psychologue. Elle cherche ses mots. Elle veut rester juste.
“C'est davantage un problème de… personnalité. Vous êtes à la recherche de votre propre personnalité.”

“A dans deux semaines madame. Merci. C'est cette porte-ci ?”
Mais pourquoi pose-t-elle cette question ? Elle a déjà sa réponse. Elle a vu le garçon qui était passé avant elle sortir par l'autre porte. Les patients se croisent.
“Non, c'est celle-ci. C'est vrai qu'il y a beaucoup de portes ici.”
Non, ce n'est pas vrai. Il n'y a que deux portes devant moi, et je sais par laquelle je suis entrée. Mais je m'excuse, c'est moi qui ai commencé à reprendre mon rôle. A vous poser une question par automatisme. Il n'est plus temps de choisir ses mots.

Je sors dans la rue, dans la vraie vie. Je suis à la recherche de ma propre personnalité, il est vrai que je ne sais pas me situer. Mais ce sondage, va m'aider. J'en suis certaine.

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Céline.

Elle n'a pas deux ans


Aujourd'hui, ce n'est pas du tout son anniversaire. Ni même son "moinniversaire". Rien du tout. C'est un jour normal. Elle me parle, comme elle l'a fait hier, comme elle le fera demain. Demain, elle me parlera peut-être un peu mieux, elle me parlera peut-être d'une chose inédite, mais je ne l'entendrai pas forcément. Parce qu'en fait c'est discret, la parole, c'est doux, c'est normal, ça fait parti de notre vie d'humain. Lorsque je ne comprends pas l'un de ses mots, elle me fait un signe et si elle ne connait pas de signe qui correspond et bien… nous baissons toutes les deux les yeux. Elle est déçue de ne pas avoir su tout me dire, je suis déçue de ne pas avoir été capable de la comprendre. Elle me pardonne toujours. Ce n'est pas si grave ma petite maman, on va changer de sujet. Et nous parlons d'autre chose.

Aujourd'hui elle m'a dit qu'elle voulait une moto pour en faire avec Teddy, le petit voisin. Son papa lui avait raconté une histoire comme ça pour l'endormir. Je n'aime pas trop les motos, c'est bruyant et dangereux mais comme dit son papa : "D'ici là, peut-être que ça sera des motos électriques…". Ca m'a un peu rassurée de penser les choses de cette façon alors j'ai dit à ma fille : "Si tu veux une moto, il faut que tu t'entraînes avec ton vélo." Alors je lui ai apporté son vélo. C'est une petite draisienne. En fait, ce n'est même pas un vélo. Mais les sons "r" ou "d" c'est pas son truc (tout comme les "v") alors elle dit "lolo" et on se comprend. Moi je dis vélo pour pas faire la relou.

Une draisienne c'est un vélo sans pédale. On avance en courant.


Je lui ai dit : "Viens, on va traverser la rue." C'est que, jusque là, elle n'avait fait du vélo qu'en ligne droite alors… faire du vélo en dehors de la cours de l'immeuble, comme ça, c'est un peu de la folie. Elle m'a regardé avec de grands yeux ronds. Je voyais qu'elle était heureuse. Elle a fait son premier virage. "Oh maman ! Moi, tou'ne !" J'étais contente pour elle. Elle a dit un mot que je n'ai pas identifié. Je crois que ça voulait dire : "J'ai réussi."

Nous avons fait le tour du quartier. Elle était fatiguée, elle est tombée deux fois. Je lui ai demandé si elle voulait descendre du vélo, elle a refusé. Et puis elle m'a raconté : "Moi, poum. Moi, humhum (elle mime l'enfant qui pleure). Maman : "Encore lolo ?" Moi : "Oui, encore !" Moi, ém."

Et après tout ça, je n'ai même pas de photo d'elle sur son beau vélo. Ce n'est rien. Cette image, je la garde bien précieusement dans ma tête même si je sais que ça fera comme la parole. Demain, elle ne basculera plus dans la descente. Demain, elle roulera en ligne droite sans problème. Demain, ses pieds ne toucheront plus le sol pour qu'elle aille plus vite. Demain, elle saura utiliser son frein. Demain, elle ira même dans l'herbe. Demain, elle pédalera les cheveux au vent. Tout ça normalement, doucement, comme la vie. Je ne verrai rien changer. Je me rappellerai de ma petite loutre qui marche à tous petits pas sur sa draisienne et je me dirai : "Comment ça ? Ses pieds touchaient à peine le sol ?!" 

Je n'y croirai plus. Et elle me dira : "Regarde Maman comme je vais vite ! Je l'aurai quand ma moto ?"

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Céline.

Je suis maître Jedi… !


Il était tout jeune, doux comme les chiots savent si bien l'être, déjà grand. J'ai plongé mes mains dans son poil, j'ai senti un peu sa chaleur, j'ai surtout senti son corps se détendre et s'affaler à mes pieds. Il s'allongeait devant moi, pour que je le caresse encore, plus tendrement. Il me demandait de l'amour comme aucun humain n'avait jamais osé le faire. J'ai mis un doigt dans sa gueule. Il avait encore ses dents de lait mais elles étaient déjà impressionnantes. J'ai mis toute ma main. Il faisait bien attention à ne pas me faire de mal, même si ses yeux, en se tournant vers moi, me demandaient franchement quel rituel je faisais là. Je testais la confiance que je pouvais avoir en lui. J'avais peur des chiens, un peu au début parce que je ne les comprenais pas, et puis franchement depuis que je m'étais faite attaquée tous crocs découverts. Mais lui, je savais qu'il était clair dans sa tête. Suffisamment fier, suffisamment doux, suffisamment prévenant. Il était parfait. J'ai pleuré la première fois que je l'ai quitté, pensant ne plus jamais le revoir. Nous n'avions pas prévu d'adopter si vite, nous n'avions même pas de panier. Et puis l'Explorateur a téléphoné, pour qu'on retourne le voir dans sa maison, pour qu'on l'enlève. Tout c'est fait en deux semaines à peine.

Il s'appelle Jedi. Et je suis sa maîtresse.

Il s'était râpé le bout du nez avant qu'on prenne cette photo,
mais je le trouve quand même très beau !


Bon, faut que je nuance, je le sens bien : François et moi sommes ses maîtres. Enfin, c'est bizarre. C'est moi qui ai rempli les papiers, j'ai toujours mis mon nom avant celui de l'Explorateur… et lorsqu'on reçoit par courrier la confirmation du changement de propriétaire, je découvre que tout est au nom de François. Je trouve ça injuste, je soupçonne l'administration d'avoir, de nouveau, fait un excès de sexisme. Comme lorsque je reçois des enveloppes adressées à : "Monsieur le chef d'entreprise Céline Joséphine Jeanne D…"

Je crois qu'il faut d'abord que je vous le décrive, physiquement. Il est suffisamment haut pour que je n'ai pas besoin de me baisser pour lui caresser la tête lorsqu'il se met à mon pied. Ses grandes oreilles triangulaires s'orientent d'un côté et de l'autre pour capter tous les sons de la maison et de l'extérieur. Je chuchote mes ordres tranquillement, je sais qu'il m'entend même lorsqu'il ne m'obéit pas parce que ses oreilles le trahissent. C'est un chien intelligent, mais il ne contrôle pas sa curiosité. Ses yeux bruns dorés sont encadrés par deux magnifiques lignes de khôl noir. Ils nous suivent toujours, eux et sa truffe de jais, quelques soient nos actions dans la maison. Il n'y a que lorsque nous sortons une bouteille de lait et les pots à yaourt qu'il se sauve dans la salle d'étude, car il n'aime pas le son du mixeur. Son poil est blanc, parfois champagne sur le bout de ses oreilles, mi-long, particulièrement touffu le long de ses pattes arrières et sur sa queue qui voltige lorsqu'il descend les marches des escaliers. Il trottine comme un petit cheval blanc entre les arbres de la forêt, court à fond de train comme un fou pour rentrer à la maison, me suit à pas de loup lorsque je tente de lui faire un exercice de rappel.

C'est un chien pot de colle, qui a souvent peur que nous l'abandonnions. Il préfère rester sous la table à nos pieds que d'aller jouer dans un jardin. Enfin, il préfère… disons plutôt qu'il exige, à coup d'énormes pattes prêtes à défoncer toutes les portes pour nous retrouver. Lorsque je dois le laisser seul à la maison, je mets en boucle des enregistrements audio que la loutre et moi lui préparons. Petits mots de l'adorable, sons de la cuisine, chaises portes et chaussures qui se déplacent, légers rappels à l'ordre ("Jedi, dans la cabane ! Tutut, Jedi, pas toucher…") voilà ce qui constitue pour lui de belles musiques de méditation. Et mon unique chance de retrouver la maison encore habitable à mon retour.

Il fait parfois équipe avec l'adorable, lorsqu'ils courent ensembles dans la maison, retournant meubles et tapis sur leur passage, chacun un jeu dans les mains et dans la gueule. Ou lorsqu'ils m'apportent, l'un un mouchoir, l'autre une léchouille au visage, parce que je pleure accroupie dans la cuisine. C'est l'émotion que je leur dis. Alors la petite loutre dit : "‘Iens" au gros toutou et tous deux vont s'asseoir devant moi en attendant que ça passe. Ils sont si drôles que ça passe très vite, les émotions de maman.

Dimanche, nous sommes allés à l'éducation des chiens. C'était notre première fois et nous devions effectivement être bien drôles tous les deux. Entre une maîtresse qui ne comprend pas les codes en vigueur : "Mettez le ansé, maintenant on va faire le rat…" et ce gros chien blanc qui essaie de comprendre pourquoi tout d'un coup on lui impose de marcher à gauche alors qu'il y a pleins de chiens cool avec qui jouer ici… On en avait bien besoin, de ce cours d'éducation. On y retournera dimanche prochain. Et même si cette fois ça sera à l'Explorateur de se mettre en C et tout le tralala, on va s'entrainer tous les jours, Jedi et moi, histoire de montrer qu'il est intelligent et civilisé et que sa maîtresse, même fluette, même avec sa voix qui chuchote plus qu'elle ne crie, ne prend pas tous les êtres vivants pour des bébés.

Ce gros chien blanc a fêté sa première année tout récemment et il en a déjà appris, des trucs, à sa maîtresse ! Elle qui ne se doutait pas de la puissance de la communication inter-espèce, du travail que cela demande tous les jours pour faire vivre une bête puissante comme un lion à côté d'une petite humaine haute comme trois pommettes, pour tisser une amitié durable, clairement inégale mais sincère. J'ai compris les différences qu'il y a entre lui et un enfant. J'ai compris ce que je pouvais attendre de lui, ce que je devais lui apprendre, et ce que lui se devait de respecter. Rien n'est naturel dans notre relation, on plonge tout droit dans le paradoxe de l'être humain par rapport à la nature. Lorsqu'il s'allonge à mes pieds, son museau — qui cache à peine ses crocs longs comme mon petit doigt mais puissants comme mon bras — délicatement posé sur le bout de mes orteils, nous sommes en plein délire. Alors oui parfois j'ai des overdoses de lui, parce qu'il est toujours auprès de nous, perdus dès que nous nous éloignons. Alors oui parfois je suis en colère parce que la moindre de ses bêtises prend des proportions titanesques. Alors oui parfois je me demande jusqu'où ça va me mener, tout ça, et j'ai un peu peur. Mais nous nous aimons. Et c'est incroyable de vivre ça.

Etre un maître (de) Jedi, c'est de la vraie folie.

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